Classement des Lycées 2016

Le Ministère de l’Education Nationale vient de publier les résultats des lycées que la presse reprend pour ses fameux classements. Les taux de réussite des élèves de Terminale au Bac ne suffisent pas en effet pour apprécier les résultats d’un lycée. Il faut aussi prendre en compte les taux d’accès au bac, notamment à partir de la seconde, pour savoir combien d’élèves entrant dans un lycée peuvent accéder en Terminale et passer véritablement le bac. Et, sur ces deux critères, quelle est la « valeur ajoutée » du lycée, c’est-à-dire quelle est la différence positive (ou négative) avec les résultats « attendus » compte tenu des origines sociales des élèves et d’autres critères qui y sont souvent liés (nombre de redoublants en collège par exemple) .
Qu’en est-il à Saint-Denis pour les trois lycées d’enseignement général et technologique de la ville ? Globalement, JBS (Jean-Baptiste de la Salle) a le meilleur taux de réussite au bac 2015 (99%), suivi par Paul-Eluard (87%) puis Suger (63%), mais c’est Paul-Eluard qui l’emporte pour la valeur ajoutée avec +7,7 sur JBS qui fait quand même +2,8. Ceci veut dire que ces deux lycées ont eu des résultats au bac 2015 meilleurs que ceux qui pouvaient être attendus. Par contre, Suger se retrouve avec une « valeur ajoutée » négative avec 10,3 points en moins que les résultats attendus.
Dans le taux d’accès de la seconde au Bac, c’est JBS qui a le meilleur résultat (80%) suivi par Paul-Eluard (74%). Très loin derrière se trouve Suger avec seulement 39%. Mais là aussi, en terme de valeur ajoutée, Paul-Eluard fait mieux avec +9 que JBS qui obtient +2. Quant à Suger, le résultat est négatif avec -18.
Bref, Saint-Denis dispose de deux lycées, l’un public Paul-Eluard, l’autre privé sous contrat Jean-Baptiste de la Salle , qui obtiennent des résultats remarquables dans l’accès au bac des élèves entrants en seconde et dans la réussite au bac, meilleurs que les résultats attendus compte tenu des origines sociales des élèves. Malheureusement, le troisième lycée continue d’avoir de grandes difficultés pour conduire les élèves de la seconde jusqu’à la réussite au bac.
Avec près de 90 % de taux de réussite, le bac est devenu un diplôme dévalorisé ; les bons établissements sont proches de 100 %, les moyens 90 % et les mauvais 80 % (Suger est un cas isolé).
Le seul intérêt de ce type de classement serait éventuellement d’établir une hiérarchie sur les mentions ; mais même là, 50 % des candidats obtiennent une mention dont 10 % de mention »très bien ».
Toutes les sélections futures se font sur ces mentions »très bien » (10 % environ au niveau national ) et »bien » (15 % environ) soit sur 1/4 des candidats.
Dans le lycée où a été mon ainée et où est ma cadette aujourd’hui, les »très bien » sont à 58 % et les »bien » à »28 % » .
Les mentions au bac jouent un rôle marginal pour le recrutement dans les filières sélectives. A la suite de l’inscription sur APB qui se termine en mars, les commissions de sélection des classes prépas, IUT et BTS se réunissent et classent les candidats retenus sur sur la base des dossiers scolaires de Terminale et Première. Tout est donc joué avant le bac ! Les résultats au bac (et donc les mentions) connus début juillet n’interviennent pas. Ces mentions ne peuvent être utiles que pour les places laissées vacantes dans certaines filières sélectives, après les inscriptions des élèves. Elles jouent donc un rôle très faible pour l’inscription des élèves dans l’enseignement supérieur.
Par contre vous avez raison de penser que les mentions au bac sont un indicateur de la réussite des lycées, les taux de réussite au bac étant généralement très élevés. Mais là on revient à la question posée il y a vingt ans quand la presse classait les lycées sur les seuls taux de réussite au bac. Quelle est la valeur ajoutée par un lycée ? Un recrutement social très favorisé, plus une sélection des élèves de la seconde à la Terminale permettent à un Lycée (privé ou public) d’avoir des résultats au Bac excellents notamment pour les mentions. Il faudrait que les statisticiens du ministère calculent aujourd’hui la valeur ajoutée d’un lycée pour les mentions au bac et plus seulement pour la seule obtention du bac…
Mais cela en vaut-il la peine ? Pour les parents et les élèves comme d’ailleurs pour l’Education Nationale, ce qui est vraiment important est de savoir si un lycée se rend capable de réduire les déterminismes sociaux dans la scolarité ou s’il se contente de les accepter ou, pire, s’il les aggrave !
… Certes mais la correspondance entre de très bons résultats durant l’année scolaire et une mention au bac est presque toujours vérifiée.
Résultat par exemple, les promos des prépas les plus sélectives sont souvent composées d’élèves ayant tous décrochés une mention bien ou très bien au bac.
« les promos des prépas les plus sélectives sont souvent composées d’élèves ayant tous décrochés une mention bien ou très bien au bac »
Les élèves qui vont dans les promos les plus sélectives sont déjà de très bon élèves. Le lycée n’a pas vraiment de « mérite » à leur faire décrocher une mention vu que ces élèves ont toujours été doués. Pour rentrer dans ces lycées comme JBS ,on les sélectionne à l’entrée et on ne prend que les très bons (c’est pourquoi d’ailleurs les classes sont très chargées car on sait qu’ils peuvent quand même travailler).
Donc même s’ils vont dans des lycées comme Eluard, ces élèves là (qui vont dans les prépas les plus sélectives) décrocheront de toute façon une mention. Or à Paul Eluard, il n’y a pas de sélections des élèves à l’entrée, il est donc normal qu’il y ai moins de mention à l’arrivée vu qu’il y a moins d’élèves très doués qui y rentrent. Faites une sélection d’élèves à l’entrée d’Eluard et vous verrez le résultat. Là ce qui est fort, c’est qu’ils arrivent à faire monter le niveau des élèves. Ce que n’a jamais fait JBS.
Vous savez, dans le privé certains profs ne sont même pas titulaires et ça les parents ne le savent pas.
Vous savez, il ne suffit pas d’avoir une mention pour rentrer dans une filière sélective. De nombreux élèves avec mention s’y font recaler à l’oral d’entrée. De plus, il ne faut pas oublier que la sélection dans les filières sélectives ne se fait pas à l’entrée comme on le croit mais au terme de la première année. C’est là qu’on voit si l’élève a le mental pour passer le choc de la première année.
Vous avez apparemment des préjugés sur l’enseignement privé sous contrat ! On peut être partisan de l’enseignement public – ce qui est mon cas (d’autant plus que j’y enseigne depuis 40 ans…) – et être objectif sur les établissements d’enseignement privé.
Vous dites que JBS ne fait pas progresser les élèves. Socialement, c’est faux : comme le rappelle l’article ci-dessus, sa « valeur ajoutée » est de +2,8 pour le bac et de +2 pour l’accès de la seconde à la Terminale en 2015. C’est certes moins bien que Paul-Eluard, mais très nettement mieux que Suger qui, lui, voit les « chances » de ses élèves régresser. Quant à la présence de non-titulaires, elle est aussi forte et parfois même plus forte dans le public que dans le privé sous contrat, tant pour les remplacements de professeurs en congé que pour des postes à l’année !
J’ai retrouvé les résultats de Paul Eluard 2014
http://www.france-examen.com/palmares-lycees/bac-general/creteil/seine-saint-denis-93/lycee-public-paul-eluard-saint-denis
Si on considère que seules les mentions »très bien et bien » ont une véritable valeur ajoutée pour le futur, Paul Eluard se révèle comme un mauvais Lycée avec environ 14 % à comparer à la moyenne nationale qui est de 25 %.
Je pense que vous avez tort à propos de Paul-Eluard. Si l’on veut apprécier un lycée, l’important est de savoir s’il arrive ou non à faire reculer les déterminismes sociaux dans la scolarité. Pour les mentions, aucune statistique n’existe pour cela. Pour la seule obtention du bac et pour le parcours des entrants en seconde jusqu’au bac, les statistiques donnant la « valeur ajoutée » d’un lycée sont significatives de l’orientation d’un lycée. De ce point de vue, Paul-Eluard et JBS, à Saint-Denis, sont des bons lycées.
Je viens de me faire incendier sur mon commentaire sur Paul Eluard.
Je précise donc que les »indicateurs de performance des lycées » (qui datent de plus de 20 ans maintenant) pour établir un palmarès sont du bidonnage du Ministère de l’Enseignement et contribuent d’ailleurs à alimenter l’idée de discrimination géographique.
Ainsi, faire croire que Paul Eluard est un excellent Lycée et que concomitamment les étudiants issus de ce lycée sont discriminés pour leurs futures inscriptions est une supercherie. Je maintiens qu’avec moins de 15 % de mention Très bien ou Bien, Paul Eluard se situe très en deçà de la moyenne nationale et, hélas (ou pas hélas) la sélection se fait sur ce critère.
Bonne journée à tous … et bon courage pour cette journée de grève.
Ce n’est pas du bidonnage, c’est la réalité ! Il n’y a aucun mérite à JBS d’emmener les éleves au bac avec une mention vu qu’il y a une très forte sélection en seconde pour rentrer à JBS : il ne prennent que les très bons élèves pour rentrer dans l’école. C’est donc facile pour un prof de les amener au bac avec mention !! Alors qu’à Eluard, il y a vraiment un mérite des profs vu qu’il n’y a pas de sélection en seconde. Ce sont donc de très bon profs, car faire monter le niveau d’un élève c’est ce qu’il y a de plus difficile, seuls les bons profs peuvent le faire.
@S.P. : Le rôle des enseignants est essentiel en effet, mais il ne s’agit pas que de qualités personnelles. Je ne suivrai pas votre raisonnement, car je ne crois pas du tout, par exemple, que les professeurs du Lycée Suger de Saint-Denis soient de « mauvais profs », malgré les très mauvais résultats de ce Lycée.
Il y a un « effet professeur », mais il y a aussi un « effet établissement » tout aussi important : objectifs clairement fixés de réussite scolaire par l’établissement, politique de suivi des élèves pour éviter le « décrochage », coordination du travail de toute l’équipe éducative (enseignants, administration, personnel administratif et technique).
De plus cet « effet établissement » positif, que l’on constate à Paul-Eluard, ne peut s’établir que dans la durée et peut malheureusement être remis en cause en quelques années. C’est un travail permanent de l’ensemble de l’équipe éducative et aussi bien sûr des élèves et de leurs parents.
Je n’ai pas écrits que les professeurs du Lycée Suger sont de « mauvais profs » donc ne me faites pas dire ce que je n’écris pas. Je dis juste qu’il n’y a aucun mérite pour un prof à amener à la réussite les bons élèves. Et je ne pense pas du tout que les professeurs du Lycée Suger soient de « mauvais profs », au contraire. Ils ont toute mon admiration. Je pense juste qu’il y a plus d’élèves en difficulté dans ce lycée.
Vous pensez donc que Paul Eluard fait de la sélection pour avoir de meilleurs élèves que Suger ?
Réponse à Bill. Non pas du tout. Je pense que la carte scolaire est mal foutue, c’est tout.
Je crois déjà l’avoir écrit ici, j’ai inscrit sans aucun préjugé ma cadette dans un collège public flambant neuf quartier Pleyel. J’ai rencontré des élus (Pierre Quay Thévenon, Philippe Caro) ; j’ai écrit au recteur d’Académie ; toujours le même discours sur les moyens … Au bout d’un trimestre (vacances Noël) basta … redirection en urgence vers JBS, collège et Lycée qui n’ont rien d’exceptionnels sinon d’œuvrer normalement à l’épanouissement des gamins … rien d’exceptionnels je répète …
Le jour où sans aucun a priori on lira ce qui disent Finkielkraut, Onfray, Régis Debray etc sur l’école on aura fait un grand pas vers la bonne direction.
Pour les autres, continuez à faire l’autruche …
Effectivement, c’est malheureux mais le fait de choisir JBS permet seulement aux enfants une scolarité normale, comme elle aurait été dans un public hors 93. Le niveau est normal et la sélection se fait particulièrement sur le comportement. C’est triste à dire mais les parents ne payent pas pour un établissement élitiste, juste pour une éducation normale. Et très peu payent pour l’aspect catho, vu la mixité (représentative de la population dionysienne), ce n’est pas l’aspect religieux qui motive mais le cadre plus propice à l’apprentissage.
La sélection est très dure en 2nde vu que de 8 troisièmes, le lycée passe à 2-3 secondes de mémoire et que tous les bacs ne sont pas proposés vu qu’ils se sont plutôt spécialisés dans le technique / scientifique avec de très beaux ateliers : pas de bac littéraire, seulement 1xES et 2xS.
à Mourad :
que reprochiez-vous exactement au collège public ?
Dans le cas spécifique de ma fille, j’ai retrouvé cela dans le blog de Philippe CARO :
http://philippecaro.over-blog.com/2014/09/rentree-difficile-au-college-dora-maar-de-pleyel.html
… et c’est très très édulcoré.
La lecture du post ne m’a pas vraiment convaincue. Il me semble que les dysfonctionnements sont globalement le fait d’un collège neuf, ouvert sans doute dans la précipitation, et de surcroît vanté (ce qui est une ânerie politicienne) comme un collège tout numérique.
Personnellement, il est sûr que je me pose la question : enseignement public ou privé ? – ce qui est forcément le lot des jeunes ménages dyonisiens (genre bobo) avec enfants.
Par ailleurs, j’ai été professeur en collège très difficile dans une ville pauvre du 93 pendant 7 ans. Je me suis alors posé la question : y mettrais-je mes enfants ?
Au début, impossible d’imaginer une telle chose : j’étais néo-titulaire (après l’année de stage) et je me faisais « bordéliser ».
Après deux ans, les choses ont évolué : je n’avais en tout cas pas l’impression d’être une catastrophe pour les bons/ sérieux élèves de mes classes, je pense que j’étais même assez exigentes pour eux.
Je précise que ce collège avait un public à 75 % de familles défavorisées, voire très défavorisées et qu’il tournait pourtant sans problème majeur (équipes relativement stables, direction pas trop catastrophique).
La seule chose à mon sens délicate était l’exclusion de fait que subissait les « indigènes » français, à peine 1 ou 2 par classe, qui n’avaient pas d’amis et semblaient écartés des groupes ethniques.
Je suis intimement convaincue que si les parents « indigènes » que je vois tous les jours dans le centre de Saint-Denis et à l’école de ma fille (en moyenne section !) décident de « jouer le jeu » et de mettre leurs enfants au collège De Geyter, il y a de fortes chances pour que ces années se passent plutôt bien pour ma fille.
Car le problème du collège public n’est pas un problème de professeurs.
A propos du lycée Suger évoqué plus haut :
Je pense comme Thierry B que c’est principalement un problème de politique d’établissement et non de carte scolaire (le collège de centre-ville De Geyter y est sectorisé par exemple, alors que le lycée Eluard reçoit des élèves de Triolet et de Fabien, deux collèges à plutôt très mauvaise réputation).
Par exemple, une collègue qui intervient au lycée Suger me racontait que dans les couloirs il n’était pas rare de croiser des lycéennes voilées, avec des surveillants qui discutaient famillièrement avec des élèves à casquette, sans qu’il ne soit fait aucune remarque. C’est un détail, mais il en dit long sur la politique de l’établissement.
J’ai aussi entendu dire que le lycée Eluard bénéficiait, pour diverses raisons, de financements supplémentaires, qui se trouvent bien utilisés.
Le problème dans les primaires publics à St Denis c’est surtout le manque d’enseignants et de réseaux de soutien scolaire pour « rattraper » si nécessaire les enfants en besoin.
De nombreux parents « indigènes » ont fait le choix d’envoyer leurs enfants en public. Mais les enfants ont subi de trop nombreuses journées sans instit. juste pour leur classe et ils en arrivent à stresser. Il y a aussi le besoin d’amener tout le monde à un niveau correct de français et mathématiques sur un temps restreint qui limite parfois l’enseignement des autres matières telles que histoire ou sciences. Tout ça fait qu’ils ont renoncé au public à St Denis pour apporter une scolarité plus sereine. Les collèges n’ont pas forcément très bonne réputation et avant d’arriver au lycée, il faut déjà passé cette étape cruciale de pré-adolescence et c’est le principal souci des parents dionysiens, surtout pour ceux qui ont déjà eu du mal au primaire.
Certains optent pour le privé, d’autres ont des atouts pour intégrer un public parisien, la richesse dionysienne des couples mixtes permet à d’autres d’intégrer des publics internationaux… Mais beaucoup de familles tentent de contourner le collège.
J’ai oublié de préciser que j’ai d’autant moins de préjugés sur le public que ma fille ainée a fait toute sa primaire et toute sa secondaire dans le public et ma cadette est retournée dans le public après son passage en seconde même s’il est vrai qu’il s’agit d’un Lycée un peu privilégié.
Autre paramètre, il y a enfant et enfant : un extraverti qui a soif d’apprendre et de découvrir, vous pouvez le mettre à peu près partout, pour un intraverti il y a des précautions à prendre.
Enfin un point particulier me concernant, lorsque votre enfant à un prénom musulman, un nom musulman, le »faciès » musulman et qu’elle se retrouve majoritairement dans un collège où les élèves sont musulmans, vouloir vivre sa scolarité en toute laïcité et toute indépendance cultuelle est une complication supplémentaire … et là aussi j’emploie des mots très édulcorés.