Le Monde : La Seine Saint Denis pourrait fermer des centres de dépistage des MST par manque de moyens
Information inquiétante pour tous les habitants. Vu les risques de contamination, c’est notre santé à tous qui est concernée, par seulement celle des plus démunis. Bill
La Seine Saint Denis n’a plus les moyens de dépister efficacement la tuberculose et les maladies sexuellement transmissibles (MST) après que l’ État a supprimé les financements » indispensables « , a affirmé mardi 26 août le président du conseil général, Stéphane Troussel.
Alors même que » tous les indicateurs de santé sont au rouge » dans l’un des départements les plus pauvres de France, avec des taux d’infection supérieurs et une espérance de vie plus courte, » on est dans la recherche d’économies forcenée « , a lancé le patron PS du département lors d’une visite dans un centre de Médecins du Monde à Saint Denis.
Dans le détail, si l’Etat ne pallie pas la suppression d’une subvention annuelle de 1, 5 million d’euros versée jusqu’à l’an dernier par l’Assurance maladie à la Seine Saint Denis, sept centre de dépistage pourraient fermer, selon le conseil général. La subvention représente 15% du budget santé du département.
Les » opérations de dépistage itinérantes « , qui permettent par exemple de prendre en charge les habitants des bidonvilles ou des foyers de travailleurs migrants, seraient également remises en cause par la suppression des financements de l’Etat.
UN PROBLEME DE SANTÉ PUBLIQUE
Une remise en cause du réseau de dépistage mis sur pied en Seine Saint Denis pour des patients qui ne parlent pas français et n’ont pas accès aux soins, des mal-logés ou des sans domicile ou encore des précaires sans couverture maladie » poserait un problème de santé publique avec un développement des formes multirésistantes » de tuberculose, a affirmé la déléguée générale de Médecins du Monde.
Le 93, qui concentre les populations précaires à risque, détient de triste record de contamination par ces maladies. C’est le seul département français où la tuberculose n’a pas reculé entre 2000 et 2010, touchant environ 31 personnes pour 100 000 habitants chaque année, soit quarte fois la moyenne nationale, selon l’institut de veille sanitaire. Les MST y font également plus de dégâts qu’ailleurs.
En forme de protestation et en l’absence de réponse du ministère de la Santé, le département a dénoncé jusqu’à nouvel ordre l’accord qui le lie à l’État pour les missions de santé, qui comprend également le dépistage de certains cancers et les vaccinations.
Article du Monde du 26/08/2014
Silencieux, les yeux cernés par la fatigue et l’errance, des dizaines de patients attendent leur tour dans la salle du centre d’accueil de soins et d’orientation de Médecins du monde à Saint-Denis, indifférents au ballet des élus et des journalistes. Hier, Stéphane Troussel, le président PS du conseil général a tenu à organiser une conférence de presse au sein de cette structure pour dénoncer la politique de l’Etat en matière de santé. En ligne de mire : la décision de la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de ne plus verser au département une dotation de 1,4 M€ d’euros qui lui permet de mener des actions de santé en matière de vaccination et de dépistage de la tuberculose, des IST (infections sexuellement transmissibles) et de certains cancers.
Depuis 2010, le conseil général, en partenariat avec Médecins du monde, mène ainsi des consultations de prévention et de dépistage sur le site d’accueil de l’association humanitaire. Tous les mardis, un bus du département propose aux patients une radiographie des poumons. « Une trentaine de patients bénéficient chaque semaine de ce dépistage », explique Nathalie Godard, coordinatrice générale chez Médecins du monde. « En quatre ans, cette action a permis de détecter une quarantaine de cas de tuberculose et une trentaine de cas d’infection sexuellement transmissible, en premier lieu des hépatites B, ce qui est considérable. » Qu’en sera-t-il demain ? Le 1er janvier 2015, cette mission, comme celles menées par les sept centres de santé départementaux*; relèvera de l’Etat et non plus du département. « L’Etat est censé prendre le relais, commente Stéphane Troussel. Mais, à ce jour, alors que j’ai sollicité à plusieurs reprises Marisol Touraine, celle-ci ne nous a toujours pas répondu et nous ne savons pas ce que vont devenir ces actions. Par son silence, la ministre de la Santé semble acter la fermeture des centres départementaux et la fin pure et simple des consultations. »
Contactée, la CPAM, par la voix de son directeur général, François-Emmanuel Blanc, indique que « cette subvention était versée historiquement au département du 93 mais n’a aucun fondement réglementaire. La Seine-Saint-Denis bénéficiait jusque-là d’une tolérance, elle doit maintenant rentrer dans le rang ». Afin de trouver un terrain d’entente, le président du conseil général doit rencontrer en octobre celui de l’Agence régionale de santé (ARS) Claude Evin. « La situation sanitaire du 93 me préoccupe mais nous devons discuter du montant financier et des actions qu’il convient de mener dans ce département », indique ce dernier.
En première ligne avec les patients, les médecins ne cachent pas leurs inquiétudes. « Je n’imagine même pas que le bus de dépistage de la tuberculose puisse disparaître, avoue Jeanine Rochefort, une des médecins bénévoles. Les patients que nous recevons sont des personnes en situation de grande précarité, 70 % d’entre elles ne parlent pas français… Si demain, elles doivent aller dans différents lieux pour bénéficier du même dépistage, elles n’iront pas. C’est un vrai problème de santé publique car la tuberculose est une maladie très contagieuse. » La Seine-Saint-Denis est le département métropolitain le plus touché par cette affection qui atteint les poumons.
* : Aubervilliers, Aulnay-sous-Bois, Bobigny, Montreuil-sous-Bois, Noisy-le-Grand, Saint-Denis, Villemomble