Pique-nique contre l’insécurité
DE LA RUE Brise-Echalas aux rues Dezobry, Ernest-Renan ou Gambion, du square de la rue Paul-Eluard aux berges du canal… Autour de la gare de Saint-Denis, quartier déjà truffé d’immeubles vétustes, les habitants et la plupart des commerçants n’en peuvent plus. La gare est-elle vraiment devenue le déversoir d’une « faune » de trafiquants qui, peu à peu, ont investi le quartier ? Une pétition de plus de 100 signatures, lancée il y a trois semaines après un nouveau règlement de comptes mortel, a été expédiée avant-hier à la ministre de l’Intérieur, au préfet et au maire de Saint-Denis.
« Plus personne ne se sent en sécurité, nous sommes tous concernés, et surtout inquiets », explique ainsi Sophie Durand, qui vit rue Brise-Echalas et parle de « près de trois cents passages de toxicomanes par jour ».
Le ras-le-bol des habitants du quartier de la gare
Ce soir, comme un pied de nez plutôt courageux au « ghetto gare », les habitants et les responsables de la démarche quartier (voir ci-dessous) organisent un repas en plein air. Dans ces mêmes rues, sur cette berge qu’ils veulent « se réapproprier », l’espace d’une soirée d’autant plus symbolique que « c’est le samedi soir que l’on vit le pire », comme le raconte Toni, patron du café franco-portugais le Tonneau. « Saint-Denis est l’une des plus grosses gares de la région, rappelle Toni, et la ligne B dessert de nombreux secteurs assez chauds. Depuis trois ou quatre ans, on a l’impression que certains quartiers de Paris, autrefois réputés comme supermarchés de la drogue, se sont déplacés ici. » « Quand, pour rentrer chez vous, vous êtes obligé de demander pardons aux toxicomanes échoués devant votre porte, ce n’est pas vraiment sécurisant », ajoute Denis. Mais comme Toni, qui dit avoir perdu un quart de sa clientèle, il ne se laissera pas abattre. « Partir serait une défaite, nous, on a construit nos vies ici, on y travaille et je ne veux pas que les gens qui se sentent bien dans mon bar aient peur de sortir dans la rue, je ne veux pas laisser mon quartier se dégrader », lâche le patron du Tonneau. Alors, quelle solution ? Pour les habitants et les commerçants, « il faudrait déjà faire respecter l’arrêté municipal pris il y a trois mois, obligeant les commerces à fermer à 22 heures, notamment les vendredis et samedis. C’est dans ces commerces ouverts toute la nuit que se passent pas mal de choses, la drogue mais aussi l’alcool, le tapage, les bagarres, les meurtres… » Il faudrait aussi « une vraie présence policière, des contrôles, des opérations ciblées ». C’est ce que les habitants demanderont encore, ce soir, dans leur gaieté un peu forcée mais décidée.
Pique-nique à partir de 18 heures ce soir, rue Brise-Echalas et alentour.
Journaliste du Parisien Elodie Soulié